Menu
Libération
Prêt-à-porter femme automne-hiver 2015-2016

Canaillerie et opulence

Les défilés vus par le photographe Paul Rousteau.
Au défilé Givenchy, dimanche soir. (Photo Paul Rousteau)
publié le 9 mars 2015 à 19h56

Givenchy, impérial

Riccardo Tisci, aux manettes de Givenchy, a beau être au firmament de l’univers de la mode, avec tout ce que cela signifie de financements par LVMH ou d’acoquinements avec les stars, il n’en finit pas de malaxer ses propres obsessions et définit chaque saison une silhouette incroyable d’élégance. Dimanche soir, il a ouvert sa malle remplie de tenues victoriennes, faites de dentelles noires et de formes strictes. Tisci sonde une esthétique, jusque dans ses eaux les plus profondes. Le pendant de l’ère victorienne était l’impérialisme britannique aux Indes, et l’Italien couvre les visages, nez et joues des filles de lourdes pierreries. La justesse s’atteint dans des sombres redingotes d’une précision maniaque, volumineuses au niveau du buste, sur lesquelles se tracent des liserés rouges. Quelque chose de très louche s’esquisse dans les fourrures de mondaines, carmin ou peintes de bleu et orange, dans un fourreau couvert de sequins. Un romantisme sombre et toxique. Tisci, habilleur de la scène hip-hop mondiale, est aussi le maestro du gothique flamboyant.

Hermès, en finesse

Peau noire et crâne rasé, une fille avance sur le sol des locaux de la Garde républicaine. Sur elle, un blouson en agneau bleu noir et un pantalon taille haute, même couleur. C’est ainsi que Nadège Vanhée-Cybulski a entamé sa première collection pour Hermès, très attendue depuis la nomination en juillet de cette discrète créatrice à l’un des postes majeurs du luxe français. La Française de 36 ans, passée par Maison Martin Margiela, Céline et The Row, arrive en remplacement de Christophe Lemaire. Pour cette première collection, la créatrice montrait que sa discrétion accompagne une certaine continuité avec le passé de la maison, ses codes et ses fameuses matières démentes. Oui, c’est de la mode et cette allure faite de vestes en cachemire, paletot en vison ou manteaux-capes, est très contemporaine, affûtée et portable, moins romantique qu’un Lemaire. Mais, il s’agit aussi d’un vestiaire pour une clientèle hors du temps qui y piocherait une salopette en agneau noir ou une parka en veau rouge tomette. Un défi (joliment) relevé.