Le temple du dub ne ressemble pas à grand-chose. A la périphérie de Londres, un parking vide, quelques blocs de béton au coeur d'une modeste zone pavillonnaire. Les couloirs font un bruit d'hôpital, les murs n'ont plus de couleur, les bureaux exigus sont fermés par de lourdes portes. Adrian Sherwood a installé son QG dans ce désert simili-industriel. L'absence de décor ne le chagrine pas, il ne sort jamais du studio. «Il m'est arrivé de rester quatre jours durant à la console sans dormir, dit-il. Je cherchais sans cesse de nouveaux effets. Aujourd'hui, je suis toujours aussi monomaniaque, mais je rentre dormir tous les soirs.»
Autour de lui, l'agitation habituelle. Dans une pièce grande comme une kitchenette, des musiciens jamaïcains répètent à l'infini le même thème sur un synthétiseur de poche. Du studio principal filtre le son d'une basse qui fait vibrer les murs. «J'ai ça dans la tête en permanence, sourit Sherwood. Ça fait plus de vingt ans que ça dure.» Aujourd'hui, le dub est en vogue. Massive Attack, Portishead, Tricky, Renegade Soundwave, Earthling se disent, comme Sherwood, inspirés par Lee Perry, Prince Far I et autres sorciers des studios jamaïcains.
Le phénomène n'a rien de nouveau, l'Angleterre vit depuis longtemps sous influence reggae... Les Clash, Ruts, Public Image Limited ne juraient que par le dub à la fin des années 70. Adrian Sherwood, immergé dans cette musique avec son collectif On-U-Sound, était déjà de la partie. Il