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Libération
Analyse

En 1998, les ventes de rap ont explosé aux Etats-Unis comme en France.

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Un big bang musical sur fond de fracture sociale et de discours radicaux.
publié le 26 janvier 1999 à 23h18

«Tant que les hommes parleront, le hip-hop existera», prophétisait Afrika Bambaataa, DJ herculéen de la première vague rap au milieu des années 70. Hormis les jeunes Noirs et Latinos qui faisaient cercle autour de lui, se passaient le micro comme un trophée et prenaient d'autorité la parole sans intention de la rendre un jour, qui l'écoutait vraiment? Le Bronx à l'abandon était coupé du reste de l'Amérique, crevé de ruines et d'îlots insalubres, déserté par les investisseurs qui préféraient voir brûler les immeubles pour récupérer une prime d'assurance plutôt que d'encaisser la charge de familles sans ressources. A quelques stations de métro de là, l'industrie du disque se régalait de sa croissance. A l'approche du vertige des années 80, dans les clubs de Manhattan, elle profitait de la décharge festive de la mode disco. Le rap, pour ceux qui l'avaient remarqué, était au mieux un courant passager qui ne passerait pas la barre des cités. Sur ce mode, l'industrie du spectacle a longtemps résisté. Au début des années 90, en France, malgré l'impressionnante vitalité de cette scène, nous en étions encore là. «C'était comme si les décideurs tenaient une digue, dit Olivier Cachin qui prêcha longtemps dans le désert télévisuel sur l'antenne de M6, ils ne souhaitaient pas voir cette culture entrer dans le paysage. Un jour ils ont dû constater que les rappers étaient partout. Ils ont dit "On y va comme si quelqu'un avait appuyé sur un bouton.» En 1998, les ventes de rap ont enco