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Libération

Rendez-vous manqués.

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Les rappers sont plus chroniqueurs que militants.
publié le 26 janvier 1999 à 23h19

Hamé, 23 ans, membre du groupe La Rumeur, n'est pas du genre à démarrer au quart de tour. Rap et politique? Il sourit, réfléchit. «Un grand rendez-vous a été raté entre le rap et les jeunes des quartiers, au début des années 90, à l'époque du rap vindicatif.» Le garçon n'est ni désabusé ni amer, juste lucide. Il reconnaît sans mal la distorsion entre le discours farouche martelé par les rappers (constatation/contestation), et une réalité du hip-hop d'aujourd'hui (fric et frime). La voix posée, le discours clair et tranchant, Hamé poursuit: «Le rap n'est pas libérateur dans l'absolu. Il y a un rap aliénant, matérialiste, vidé de sa subversion. Et, derrière, une instrumentalisation de ce rap-là, pour masquer les problèmes, ravaler la façade, avec l'appui de l'industrie du disque qui le bombarde. Un modèle en phase avec l'idéologie bourgeoise, capitaliste, alors que le rap est né dans la merde. Et que l'une de ses fonctions fondamentales est de retourner le stylo contre les causes qui génèrent cette merde.» Étudiant en fac de cinéma, «issu du milieu ouvrier», Hamé est exigeant. Pas question non plus pour lui de verser dans le simplisme, limite démago, de certains de ses collègues: «Nous avons une responsabilité en tant que rappers. Rester sur le constat larmoyant, misérabiliste, peut être une forme de lâcheté. Nous devons amener l'idée d'une alternative politique, urgente.» Mais voilà. Hamé sait la tâche rude, d'autant que dans la profusion de groupes français, ils sont r