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Libération
Interview

Kusturica: «Mon retour au rock est une décision politique»

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Le réalisateur de «Chat noir Chat blanc» raconte son aventure musicale.
publié le 2 décembre 1999 à 2h12

L'affiche apposée sur la façade du massif Volkbühne Berliner, planté en plein quartier Est, annonce clairement la couleur: «No Smoking feat. Emir Kusturica». Douze ans après avoir abandonné le groupe de rock dont il tint la basse dès 1986, Emir Kusturica est en effet de retour au sein d'un orchestre largement mis à contribution sur la BO de son dernier film. Occasion pour le cinéaste de réaliser un vieux phantasme, d'enflammer quelques salles vite acquises à sa cause et de livrer, à échelle balkanique, sa version saltimbanque du Bridges to Babylone stonien.

Vous avez abandonné No Smoking pour tourner «le Temps des gitans». Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de revenir dans l'orchestre?

D'une part, c'est le bon moment, d'autre part, il s'agit d'une décision politique. Quand j'ai reçu la palme d'or à Cannes pour mon deuxième film, j'ai senti se profiler une menace de récupération. La meilleure parade consistait à rejoindre un orchestre et à jouer de la musique en public. Aux yeux de l'institution, c'était une démarche scandaleuse. Déjà à l'époque où j'enseignais l'art dramatique, je n'avais jamais été officiellement intronisé professeur, sous prétexte que je n'étais qu'un gars «qui jouait de la guitare». Aujourd'hui, douze ans plus tard, je me sens rajeuni dans la mesure où je participe à la création d'un nouveau concept et que je le fais au nom de la liberté d'expression individuelle. Après la guerre, et les polémiques qui ont suivi la réalisation d'Underground, j'ai retrouvé la motivation me permettant de renouer aujourd'hui avec la musique et, à travers celle-ci, de recréer cette atmosphère de cirque da