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Libération
Portrait

Oiseau rare

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Corneille, 28 ans. Dix ans après le génocide rwandais, ce rescapé d'une famille massacrée est devenu une star du R'n'B francophone.
publié le 2 avril 2004 à 0h04

Quand il ne chante pas, il chate. Et c'est toujours la même chanson que veulent les fans, l'histoire de Corneille du Rwanda, enfant du génocide devenu star du R'n'B. Une histoire d'aujourd'hui, sang, amour et happy end, incarnée par un beau garçon souriant à la voix flûtée. Corneille chante des chansons douces et gaies, à la Cigale, dans les Zénith de province et sur la FM, pour des milliers de jeunes venus des beaux et des bas quartiers. Partout résonne «On vit chaque jour comme le dernier... Parce qu'on vient de loin», paroles de tube creux s'il n'y avait l'histoire pour les lester. Le soir, sur le site de son fan-club, il relève les confidences de ceux, celles surtout, qui pleurent à ses concerts. Heureux de se savoir tant aimé, étonné de porter tant d'espérances. «Longtemps, je n'ai parié que sur ma musique. Mais ce sont surtout les mots qui portent. Ils m'ont servi de thérapie, et maintenant servent aux autres.» Corneille a le regard doux, à la fois paisible et déterminé, des enfants revenus de loin. Il s'applique à ce qu'on voie surtout son sourire, dents éclatantes sur peau noire mate.

Au Costes, hôtel VIP à Paris, il commande «toujours la même chose», poulet et petite purée. Il raconte son passé à la demande, apaisé et aussi détaché, de s'être autant répété. Cornelius, petit enfant, en Allemagne. Ses parents, anciens étudiants boursiers, sont devenus ingénieurs. Emile, son père, lui offre les meilleurs instants de sa vie, devenus les souvenirs qu'il convoque encore au