Déjà dans l'ombre du fantôme de Syd Barrett, génie perdu dans la stupeur lysergique, puis brutalisé par la paranoïa dominatrice de Roger Waters et écrasé par la virtuosité de David Gilmour, le dandy mélancolique Richard Wright était pourtant, derrière ses claviers et ses longs cheveux grisonnants, l'âme du son Pink Floyd. Dès leurs débuts, au cœur du Londres psychédélique, c'est l'éther des envolées d'orgue de Rick Wright qui leur confère ce goût étrange, dérangé, son piano free qui touche à la démence, de la nursery pop acidulée de See Emily Play à ses propres airs, qu'il interprète avec un détachement tout anglais.
Robert Wyatt l'assurait, dans le magazine Uncut : «L'apport de Rick Wright est très sous-estimé. Il crée des paysages, une atmosphère propice à l'événement. Mais il est trop modeste… See-Saw est une belle chanson ; écoutez-la et vous comprendrez à quoi servent les claviers.»
C'est qu'après la satellisation de Syd Barrett, la période planante filmée à Pompéi s'appuie sur les coulées haschischines de Wright, ses sonorités aigres et sinueuses, sa pulsation volcanique, ses trilles et dissonances sidérales, qui éloignent Pink Floyd du blues et du folk d'époque, pour en faire l'ovni des temps More.
Quand le groupe doit s'extirper de ce maniérisme, c'est encore lui, inspiré par Miles Davis, qui invente les notes épurées de piano électrique ciselant le silence, et les progressions harmoniques telluriques d'Echoes, qu'il