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portrait

La tête aux Balkans

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Goran Bregovic. Ce musicien sarajévien qui a connu la gloire avec ses BO pour Emir Kusturica, est réfugié à Paris depuis 1991. Mais c’est à Belgrade qu’il parvient à travailler.
Goran Bregovic à Venise en 2005. (REUTERS)
publié le 16 avril 2009 à 6h53
(mis à jour le 16 avril 2009 à 6h53)

On l'écoute depuis plus d'une heure, et soudain surgit au beau milieu de la pièce le poisson qui flottait dans les airs dans le film d'Emir Kusturica, Arizona Dream, dont il a composé l'entêtante musique. Avec ses airs d'adolescent attardé, alternant sourires cajoleurs et mine soucieuse, Goran Bregovic est glissant comme un flétan. Bien calé dans un fauteuil du salon de sa maison, au fond d'une cour du Xe arrondissement de Paris, il parle volontiers, mais pour dire quoi ? Souvent des formules déjà débitées dans de nombreux entretiens sur le confort de l'anonymat, le bonheur de tourner aux quatre coins du monde à la tête de son orchestre balkanique, le succès étonnant de sa musique issue d'une «petite culture». Pour l'extirper de son devoir de réserve, une seule solution : convoquer «ses» Balkans.

Goran Bregovic est un artiste comblé, qui répugne à se livrer. «Tout le monde veut mon dernier disque : pour la première fois, l'un de mes CD sort simultanément aux Etats-Unis et en Europe», jubile le musicien qui a déjà tout connu du succès, de la griserie qu'il procure aux servitudes qu'il impose. Dans la Yougoslavie de Tito des années 70, il fut une véritable rock star à la tête du groupe Bijelo Dugme (le Bouton blanc), vendant des millions de disques. Il en est revenu, affirmant avec le recul, sans crainte de jouer les rabat-joie, avoir perdu beaucoup de temps au lieu de composer une oeuvre musicale digne de ce nom.

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