Quand les humeurs contrariées d'un ciel bruineux fendent l'horizon entre fusain et lumière perlée, au point de pixeliser le quartier de la Défense, Daniel Mille ne résiste pas à l'envie de capturer ces instants sur son portable. Perméable aux atmosphères dont sa musique soyeuse rend compte avec une sensibilité aux aguets, l'accordéoniste en visite dans la capitale, à l'occasion de la sortie de son sixième album,l'Attente, se laisse imprégner par les nuances grises posées sur les toits qui pourraient illustrer une future pochette de disque. Impressionniste de l'instrument, Mille le conteur domine l'art du temps au fil d'albums baignés par cet intraduisible sentiment, clef de voûte de l'identité brésilienne qui conjugue vague à l'âme et espoir, la saudade.«Ce manque habité», comme en parle Pierre Barouh, qui lui offrit asile, à ses débuts, au sein de son label Saravah.
Mais au-delà des diaprures mélodiques, s'infiltrent aussi des histoires que cet amoureux des mots a toujours mis en perspective dans ses compositions. Notamment à travers un travail doublé d'une longue amitié avec Jean-Louis Trintignant : «Cela fait quinze ans que nous nous connaissons. On s'est rencontrés lors d'une scène dans un cloître, où il m'a demandé d'improviser pour l'accompagner. Deux ans plus tard, il me rappelait pour le spectacle sur Aragon, la Valse des adieux ; puis nous avons fait les Poèmes à Lou avec Marie. Cette fois, Jean-Louis m'a contacté pour son dern