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L’esprit d’Abbey rôde

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Jazz . Disparue il y a dix jours, la chanteuse Abbey Lincoln, grande admiratrice de Billie Holiday, fut aussi une militante des droits civiques des Noirs américains.
(DR)
publié le 24 août 2010 à 0h00
(mis à jour le 24 août 2010 à 11h23)

D'abord, on est bien obligé de lâcher les grands mots. La disparition d'Abbey Lincoln, morte le 14 août à New York quelques jours après son 80e anniversaire, vient clore doucement, délicatement, une page essentielle de la musique américaine : celle écrite par une génération de femmes - Billie Holiday, Anita O'Day, Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald… - dont les vies se sont confondues avec leur art, qui n'ont jamais triché, et qui ne seront pas remplacées.

Abbey Lincoln a quitté la scène discrètement, laissant ses affaires en ordre. Ses dernières apparitions furent émouvantes aux larmes. Sa voix avait gagné en profondeur ce qu’elle avait perdu en agilité. Son mélange de grâce et de fragilité était impressionnant. Revoyez-la au Blue Note de New York (un club où elle se produisait régulièrement) attendant dans l’ombre, à la fois vibrante et perdue, cherchant dans les premières notes jouées par ses musiciens les étincelles d’émotion qui allaient lui permettre une nouvelle fois, une dernière fois, de rejoindre le micro, la scène et la lumière.

Max Roach 5 tet feat Abbey Lincoln Baden Baden

Maturité. Abbey Lincoln était née Anna Maria Wooldridge, dixième d'une fratrie de douze, élevée dans une ferme du Michigan. Très tôt, elle écoute Billie Holiday, qui sera son principal modèle, et Coleman Hawkins. Elle fait ses premiers pas sur scène à 14 ans. Puis entame sous divers noms, comme Gaby Lee, une carrière de chanteuse de club. On la verra alors dans quelques fil