C'est en ressuscitant les accords froids de la cold wave qu'Interpol a dessiné le son des années 2000. Représentants d'un New York en proie à un renouveau rock'n'roll aux côtés des Strokes, des Yeah Yeah Yeahs et de TV On The Radio, le quartet s'est exporté sans merci. Antics, second album phare, permettait au quartet de verser dans la ballade sépulcrale, autant que dans les hits improbables dominés par la basse de Carlos D. Le successeur quant à lui s'amourachait de la taxidermie, vidant la carcasse tendue des morceaux précédents, dans un bourbier suffoquant. Pas grand-chose à sauver de l'animal mort en dehors d'une poignée de riffs assez grandiloquents pour mettre un stade à genoux.
C'est peut-être cette ambition qui aura poussé Paul Banks et ses comparses à mettre de côté le postpunk racé des débuts pour des ambiances asphyxiées, franchement laborieuses. Pourtant, nous retrouvons Interpol en première partie de la tournée européenne de U2, avec un quatrième album sans titre à défendre. «J'aime l'idée de s'exposer ainsi, avec la possibilité de toucher de nouveaux fans», admet Banks. Le chanteur apparaît confiant : «Si personne n'aime le disque, on va quand même le jouer.»
Anomie. L'assurance de Banks semble fondée à l'écoute d'Interpol. Chapeauté par le producteur Alan Moulder (My Bloody Valentine, A Perfect Circle), revigoré par la batterie méticuleuse de Sam Fogarino, Interpol se jette crescendo dans son désespoir : les m