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Interview

«Embarqués par la force des mots»

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Chanson . Jeanne Moreau et Etienne Daho revisitent en album et sur scène «le Condamné à mort» de Jean Genet, mis en musique par Hélène Martin. Rencontre.
publié le 5 novembre 2010 à 0h00

Pour ceux dont le disque de Marc Ogeret, sorti en 1971, a obsédé la jeunesse, le revival, par Etienne Daho et Jeanne Moreau, du Condamné à mort de Jean Genet aura un fort parfum de nostalgie. D'autres, plus jeunes, y retrouveront avec plaisir, en version démultipliée, toute la force de Sur mon cou, chanson extraite du Condamné à mort que Daho a interprétée pour la première fois en concert en 2001. Toutes générations confondues, les uns et les autres ignorent largement qu'ils doivent tout cela à Hélène Martin, compositrice et première interprète, en 1962, de l'intégrale du poème que Genet consacra à Maurice Pilorge, exécuté en 1939 pour l'assassinat de son amant (lire page suivante).

Contemporaine de celles de Léo Ferré pour Baudelaire, Verlaine, Rimbaud ou Aragon, la musique d'Hélène Martin pour Jean Genet est un modèle de dépouillement mélodique au service d'une langue qui endosse voluptueusement les habits de la prosodie classique, avec l'alexandrin en parure du sexe et de la mort : «Nous n'avions pas fini de nous parler d'amour./Nous n'avions pas fini de fumer nos Gitanes. /On peut se demander pourquoi les cours condamnent / Un assassin si beau qu'il fait pâlir le jour.» Qui dit mieux ? Etienne Daho, qui a beaucoup écouté le disque d'Ogeret, s'est évidemment bien gardé de gâcher le trésor légué par Hélène Martin. Basse, guitare, violon, batterie, la revisitation - sans clavier - est travaillée mais discrète.

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