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Libération
Interview

Les sorciers de Salem

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Ces trois-là déboulent du Michigan pour se produire aux Transmusicales de Rennes avec «King Night», un premier album apocalyptique à couper le souffle. Décortiquage puis interview, du fond des bois, avec Heather, Jack et John.
Salem: Jack Donoghue, Heather Marlatt et John Holland (DR)
publié le 4 décembre 2010 à 16h03
(mis à jour le 10 décembre 2010 à 12h29)

Salem est un groupe de fantômes. Trois fantômes de 20 ans et des poussières qui parlent à la poussière. Qui expriment, avec une audace musicale en forme de monumental mur du son, la déliquescence des humeurs, de la joie, de l'espoir. Cette claque sonique administrée avec une noirceur archi-ténébreuse, digne d'un électrochoc gothico-industriel une nuit de pleine lune, ne laisse pas d'alternative. On en sort abattu. Ou réveillé d'entre les morts. Pour cela déjà, ainsi que pour leur brutalité douce d'hommes (et femme) des bois, leurs sonorités urbaines, sales, viciées, alors qu'ils vivent au plus reculé de la nature, Salem est intrigant. Voilà un groupe adepte du retrait, qui semble parler aux esprits et habiter des cabanes hantées tout en se proposant de fournir à chacun un manuel de survie postmoderne.

Leur premier album, King Night, n'est pas encore sorti qu'il explose les barrières, les émotions, les normes. C'est un précipité d'enfer. Une traversée, dans la barque du charon, des eaux démontées du Styx. Et King Night, littéralement « la nuit du roi », vogue vers les ténèbres splendides armé de synthétiseurs qui sont comme les marteaux-piqueurs du troisième millénaire, accompagné par des rythmiques ralenties, des voix graves et déformées, des effets tellement distordus qu'on se demande, à la première écoute, si tant de saturation est vraiment normale. Au-delà du bang supersonique, a-t-on jamais entendu de t