On peut rêver no man's land et se réveiller nomade's land. Stranded Horse, alias Yann Tambour, trace un sillon hors-temps entre mondes musicaux. Troubadour sans frontières, il en dessine les contours avec fragilité et pudeur. Ce natif du Cotentin, passé par Paris, Bristol et désormais Lille, chemine ainsi entre l'héritage d'un folk anglo-saxon et la réinvention du paysage mandingue.«La musique ne m'a jamais semblé aussi simple et évidente, dit cet imbibé de culture brit. Elle représente pour moi une expression fluide, une forme de bavardage plaisant.» Discutable : Stranded Horse, à la beauté désarçonnante, n'a rien de bavard ; il surfe sur les silences. En dialogue entre mélopée, pop et poésie folk.
Cocon. Tambour, 33 ans, joue sur trente cordes sensibles et acoustiques : de guitare et de kora, apprivoisées seul. Epris de Chet Baker (comme de Joy Division ou des Smiths, dont il livre une rêche reprise), il a découvert le timbre ensorcelant de la kora lors d'un festival de jazz à Berlin. A peine rentré à Paris, il achète l'objet. A l'époque, Tambour est l'âme hantée d'Encre, lancé en 2000. Le verbe alors plus venimeux, une raideur rock et une programmation electro. «C'était plus cérébral, peut-être trop dicté par la performance», analyse-t-il avec le recul. Il prend l'air. Se cherche… «J'aime bien les ruptures, ne pas m'ennuyer.» Aspire à de nouveaux horizons, plus dépouillés. Ce sera Thee Stranded