Boubacar Traoré, alias «Kar Kar», grand guitariste et chanteur de blues sahélien, se fait rare. Le voilà, à 68 ans, reparti sur les routes européennes, loin des vertes collines d'Afrique. Après la Slovénie et Amsterdam, étape ce soir à Pigalle, à la Cigale, l'une des salles qu'il dit préférer à Paris. Pour celui qu'on a jadis surnommé «le Elvis Presley du Mali», «le Blouson noir» ou «Chuck Berry», l'époque de son premier tube, Mali Twist, n'est plus qu'un lointain souvenir. Ce soir, c'est le «Muddy Waters du Mali» qui donnera les chansons de son dernier disque, le lumineux Mali Denhou, sorti le mois dernier. Une rangée de ballades tranquilles comme une virée en pirogue sur le fleuve Niger.
Répression. Dans les années 60, Boubacar Traoré avait 20 ans et un succès fou, radiophonique surtout, qui ne lui rapportait pas un sou. Tailleur-coupeur chez un couturier le jour, guitariste le soir au sein du groupe Pionniers Jazz, il a fait la fête dans le Bamako fraîchement indépendant, alors rempli d'espoir. Après le putsch de 1968, patatras. Adieu la musique et l'indépendance cha-cha, bonjour la répression et le régime de parti unique. Il choisit le retour au bercail dans sa province natale, où il a exercé plusieurs métiers, dont ouvrier agricole et commerçant, avec son frère aîné. Un frère que tout le monde prend pour lui, quand il meurt en 1981. Du coup, Boubacar Traoré ressuscite littéralement aux yeux de ses compatriotes lorsqu'il réapparaît en 19