Dans le taxi qui remonte au ralenti le boulevard des Flandres (Paris XIXe), Seun Kuti tapote sur son smartphone et s'exclame : «Une proposition de concert caritatif à Londres, le 15 juin. On est pris ce jour-là ?» Arnaud, son tour manager français, ouvre l'agenda : «15 juin, Madrid.»«C'est Alicia Keys qui demande. Pas grave, ce type d'action humanitaire, très peu pour moi», conclut-il.
Seun, 29 ans, est athlétique comme souvent les Egba, groupe ethnique originaire du sud-ouest du Nigeria, à la frontière du Bénin. Il est aussi une réincarnation de l'élégance de son père, Fela Anikulapo Kuti : pantalon taille haute, costume couleur brique pilée aux fines broderies, motifs qu'on retrouve sur les mocassins assortis. Son caractère expansif et sa langue bien pendue sont eux aussi l'héritage de l'inventeur de l'afrobeat, mort en 1994 à 58 ans. S'il a déjà posé pour des shootings de mode ? «Je ne suis pas Jay-Z. Promouvoir une mode spécifiquement africaine, pourquoi pas… Mais me vendre aux marchands de fringues, pas question.»
Censure. Seun publie ces jours-ci son deuxième album, From Africa With Fury : Rise, trois ans après le fulgurant Many Things. Sur des beats lancinants, entre deux phrases véhémentes du saxo baryton, Seun touille un funk abrasif propulsé par une fantastique section de cuivres. Les brûlots anticorruption interprétés en pidgin english (cet argot mâtiné de yo