Ce soir-là, ce n’était pas les chaussettes qui étaient noires, mais le slip. Elégant, à peine dissimulé par une chemise de smoking blanche immaculée. Sourire en coin, tignasse en banane aplatie et yeux bleus en fente, Eddy Mitchell a jailli par la fenêtre de sa loge pour décocher un tonitruant : «On ira sur scène quand on voudra !» Comme si la caravane de la dernière tournée de Monsieur Eddy, réglée au petit poil, pouvait déraper en sortie de route incontrôlable. Comme si la chevauchée héroïque du P’tit Claude, entamée il y a cinquante ans sur les sommets entwistés des tubes, pouvait s’achever en échappée sauvage. Façon trash et ratage. Mais, à 69 ans, on ne voit pas Eddy Mitchell entamer une carrière de dynamiteur de statue. Non, pour les caprices de star, même de la part d’un improbable futur retraité, il faudra frapper à une autre porte.
Ce soir-là, à Annecy, Eddy s'amuse et savoure, en ému qui se cache, les dernières dates de sa dernière tournée, les dernières rencontres avec des salles combles. Car le 5 septembre, Claude Moine raccroche les gants et range tiags et Stetson. Fini les soirées à écumer les scènes de province. «Ah l'hôtel à Montluçon, ça fait rêver, raille-t-il. J'ai trop passé d'heures dans les bagnoles. Et pourtant je suis un privilégié, j'ai les moyens de me payer des avions privés et des hélicos, mais ça suffit.»
Pour faire monter la sauce, la maison de disques a bien fait les choses. La tournée est annoncée depuis des mois c