Incongrue, forcément, cette rencontre avec David Lynch, qui se déroule six pieds sous terre, au beau milieu de la journée, dans ce club privé nommé Silencio dont il a (mais qui l’ignore encore?) signé le décor.
Il est assis tout seul au fond d’une alcôve nimbée de lumière orange, son indéfectible chemise blanche boutonnée jusqu’au cou, son dos bien raide en bord de canapé, et regarde droit devant lui. Le plus étonnant, dans ce cadre confidentiel, aussi feutré que vide, où toute la circonstance bruisse d’exclusivité, n’est pas ce à quoi l’on s’attendait (à savoir, un hypothétique déroulé des fantasmes qui auraient donné naissance à ce labyrinthe de pièces, à ce tunnel doré, à ce fumoir façon forêt pétrifiée).
Non, le plus inattendu, et le plus réjouissant, c'est cet accent de fermier du Midwest avec lequel il vous salue, cette voix traînante et délibérée qui enfilera les déclarations impénétrables («Je voulais que la salle de cinéma s'apparente à des lignes qui sortent d'un point») et les messages à caractère pédagogique («le mot que vous cherchez est cosy, cette pièce est cosy»). D'un coup moins intimidant, mais toujours plus étrange, d'autant qu'un sourire bienveillant et muet vient souvent s'imprimer sur son visage mobile, souple comme du caoutchouc.
« Rien, ici, n'est connecté à l'un de mes films » Lynch est là pour faire la promo du Silencio, on ne va parler que de ça. Et encore. à une question toute simple sur sa «carte blanche» au club, la prog