«J'ai peur que les flics débarquent et interrompent le concert. Apparemment, on fait trop de bruit», se marre Oliver Ackermann, faisant fi de la réputation pourtant peu sourcilleuse de la police madrilène. C'est dire le renom de A Place to Bury Strangers, tout en guitares saturées et larsens stridents. Attablé dans un self-service où la paëlla se décongèle, le quadra dégingandé arbore le sourire béat de ceux qui vivent de leur passion. Pour la première date espagnole du trio new-yorkais, Ackermann est serein : un troisième album en vue, Worship, un nouveau line-up et l'attention de tous les autochtones orphelins de Sonic Youth. «On n'a pas encore joué le nouveau disque, on se rode doucement», explique t-il entre deux cuillerées. Ackermann n'est pas un type pressé et le fossoyeur en chef continue de patauger dans le même univers sonore, lugubre en diable. Comme si chaque nouvel opus était constitué des chutes de son prédécesseur.
Lubrique. De fait, du premier album à Worship, la musique de A Place to Bury Strangers reste globalement similaire : une resucée habile de Jesus and Mary Chain, couplée à une noise corrosive et une basse lubrique poussée à bout. Une bande-son qui n'aurait pas dépareillé dans les orgies caverneuses d'il y a vingt ans. «Le site internet Pitchfork nous a reproché de reproduire constamment le même son, râle Ackermann. Mais pourquoi prendre une nouvelle direction quand ça marche ?»<