Dressé dans la nuit de Lahore, le poing et la voix de Taimur Rahman transpercent le ciel de rage : «Talibans, oppresseurs ! Talibans, démons !» Ses accords de guitare s'invitent au milieu des participants à la veillée pour Malala Yousufzai. Cette écolière de 15 ans qui se battait pour le droit à l'éducation des filles au Pakistan a été grièvement blessée par les balles des talibans, en octobre. En quelques minutes, Taimur s'est mêlé à la foule, installant son micro sur un coin de trottoir. Il a mis en musique la colère des manifestants révoltés par cette nouvelle attaque contre la minorité dite «libérale» du Pakistan. Figure du groupe Laal («rouge», en ourdou), Taimur est, à 37 ans, un artiste unique au Pakistan. Regard brun intense et mèche rebelle, il est à la fois musicien, professeur de sciences sociales et politiques, et militant du très minoritaire Parti communiste. «Malala défend un droit humain fondamental, l'accès à l'éducation. Elle s'est mobilisée comme nous contre l'extrémisme religieux», nous dit-il, ému.
Laal improvise régulièrement des concerts de soutien aux ouvriers, aux paysans sans terre et aux libéraux. Abasourdis par la brutalité des talibans qui ont tenté d’assassiner Malala à la sortie de l’école, ces libéraux se remettaient à peine d’un autre coup de massue. La découverte, en mai 2011, d’Oussama ben Laden à quelques heures d’Islamabad a renforcé les soupçons de collusion entre les autorités et les islamistes qu’elles sont censées comb