La musique de Scott Walker est un casse-tête. Pas un casse-tête métaphorique, un vrai, une machinerie qui se manipule et pivote selon des angles calculés. Et Bish Bosch, le nouvel album de l'Américain sexagénaire (il aura 70 ans en janvier), depuis longtemps installé en Grande-Bretagne, est dans ce domaine un nouvel aboutissement redoutable. Un objet sculpté tranchant et épuisant qui se révèle également très drôle (si, si). Bien sûr, on peut aussi se contenter de se prendre dans les tripes ce disque qui vient encore raffiner la quête sonore autonomiste de Scott Engel, dit Walker, parti jeune crooner romantique à la fin des années 50, passé par la gloire sixties puis l'oubli miteux avant de se réincarner par miracle en figure tutélaire aux confins de la pop symphonique et de la musique concrète (lire page ci-contre). Mais ce serait passer à côté de la moitié d'une œuvre majeure de l'année qui s'achève. Démontage du casse-tête, pièce par pièce.
Bish Bosch donne dès son titre une première piste allégorique : et si le disque s'articulait en lointain cousin des tableaux de Jerôme Bosch, peintre néerlandais de la fin du XVIe siècle qui a laissé des toiles foisonnantes de personnages maladifs ? Bosch interrogeait la morale et la notion de péché à la fin du Moyen Age, dans des saynètes qui emmêlaient le bien et le mal. Interrogé sur le sujet, Scott Walker renvoie l'auditeur à «ce qu'il entend» dans sa musique, mais il situe