D'abord une image. Au sortir du bungalow planté dans un spot de ce joli coin de Vendée où elle répète sa prochaine tournée, Shannon Wright, gelée, sourit. La songwriter américaine des plaies intimes invite à venir l'écouter, sollicite notre avis. Un clope, un café et retour derrière sa guitare abrasive ou son orgue mélancolique, avec batteur intérimaire made in Italy.
Ensuite, un son : huit heures par jour pendant une semaine, la multi-instrumentiste bûche à mettre en scène son dixième CD solo, In Film Sound , sorte de BO à la beauté brute d'une vie rock indé, enregistrée dans le Kentucky. Si l'adjectif «sous-estimé» gardait un sens, on le lui accolerait bien. On dira aussi que sa brûlante abnégation à ne rien concéder impressionne. La preuve en sept points, entre urgence et résilience.
Le don. «J'aimerais que chaque concert soit une routine. Mais c'est faux. C'est une épreuve à chaque coup : pourquoi m'infliger ça ? Je m'y pointe comme au premier rendez-vous, j'en ressors lessivée. A 14 ans, de l'autre côté du miroir, j'éprouvais déjà cette attente. J'habitais Jacksonville, en Floride, où peu de musiciens s'aventuraient, hormis quelques indés prolos. Les Sonic Youth se pointaient là et s'arrachaient les tripes comme si leur vie en dépendait. Devant des groupes comme ça, style Dirty Three, j'ai la chair de poule, je pleure. Je porte ça gravé en moi : l'ardeur,