Avant de commencer, apprenons à prononcer le nom de l'artiste, à l'argentine : «La Shegrosssss». Devant un grand café-crème où elle émiette un croissant, la jolie brune coiffée afro explique qu'elle a longtemps détesté son patronyme : «Yegros, ça sonnait bizarre. Maintenant je trouve mon nom original, un peu brutal et primitif, comme ma musique.» En cette journée de mai, elle vient de finir les balances au Bataclan, pour la mensuelle Nuit zébrée de Radio Nova. La station parisienne programme sa chanson Viene de Mi depuis plusieurs mois et le soir, un bon millier d'enthousiastes reprendront en chœur, et en espagnol, l'entêtant refrain : «Ça vient de moi, ça vient du vent, je ne mens pas, c'est un sentiment.» Sur un rythme de cumbia digitale, le genre que son label, ZZK (prononcer Zizek) répand depuis Buenos Aires à travers la planète (lire page 23).
De la dizaine d'artistes de la mouvance ZZK, La Yegros est la première à bénéficier d'une distribution internationale. Elle est signée par EMI France (bientôt rebaptisé Parlophone, suite à son rachat par Warner Music), qui lance son disque en Europe cette semaine. Mais son nom circule depuis un bon moment dans les blogs d'amateurs de sons inédits. Le CD paraît deux bonnes années après un EP numérique très remarqué. La principale raison de cette longue attente : «L'agenda de mon producteur King Coya, alias Gaby Kerpel. Il est accaparé par son travail de directeur musical de la compagn