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FOLK

Lobi Traoré, feedback électrique

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Deux live du Malien mort en 2010 exhument la beauté hendrixienne originelle de son bambara blues.
Lobi Traoré, lors d'un concert au Bozo, un bar de Bamako. (Photo DR)
publié le 13 janvier 2014 à 17h06

En 1995, Bamako est une ville encore assez insouciante, l'islam n'y est pas si rigoureux. Dans un bar miteux, sombre et plein à craquer, un trentenaire de petite taille, béret vissé sur la tête, a en main ce qui semble être une guitare Starfield, mauvaise imitation coréenne de Stratocaster. A ses côtés, sur une scène de 4 m2, se tiennent un bassiste, un batteur et un joueur de djembé. A ses pieds, une ou deux pédales d'effet, peut-être fuzz et flanger. Des amplis bricolés sort un son puissant et distordu : un chant en bambara entrecoupé de solos parfaitement hendrixiens. Le guitariste en action est Lobi Traoré, musicien qu'on découvrira plus tard en France via quelques disques studio plutôt sages, ainsi que des passages au festival Africolor et un concert en 1996 au New Morning (Paris Xe). Lobi Traoré est un des représentants du «blues malien» avec Ali Farka Touré, Boubacar Traoré et quelques autres, dont l'excellent joueur de n'goni Bassekou Kouyaté.

Ce soir-là, à Bamako, ce qu’on entend n’est pas la musique folk africaine propre sur elle que les producteurs servent aux amateurs de la world naissante, mais quelque chose de plus tripal, hybride, en un mot plus sale : une sorte de proto-blues hésitant entre le Mali et le Mississippi, faisant des allers-retours de l’un à l’autre et finissant par laisser l’auditeur étourdi, quelque part au milieu de l’Atlantique. Si les mélodies sont incontestablement africaines, les harmonies sont celles d’un lancinant del