Si l'on devait un jour tourner une suite aux Mystères de Lisbonne du défunt Raoul Ruiz, on pourrait (en partie) la situer ici : au cœur de la ville, en sous-sol, un labyrinthe sur plusieurs niveaux, encombré de chutes de contreplaqué, rouleaux de moquette vert gazon, monceaux de paperasse et, dans un coin, des disques d'or de Depeche Mode et de Ricky Martin.
Le lieu sert de débarras à la radio qui émet, quelques étages plus haut. C'est aussi le local de répétitions de The Legendary Tigerman, alias Paulo Furtado. Le détail est cocasse : un one man band (en français, homme-orchestre) travaille dans une surface vaste comme plusieurs lofts. En fait, l'homme tigre s'est aménagé un carré, insonorisé par les chutes de moquette, ou trônent amplis et batterie. Jusqu'à présent, il se produisait seul, assis, la grosse caisse et le charley actionnés par des pédales. Pour la tournée qui accompagne la sortie de son album True, il a décidé d'innover : il sera secondé par un batteur. Avec qui il révise le répertoire. Sur un beat tranchant de Ricardo Coelho, les accords swamp s'étirent. La griffe du tigre, c'est le blues.
Carpaccio. Un peu plus tard, la bruine a chassé les passants vers les arcades de la Praça do Comercio. La ville semble capitonnée par un ciel uniformément blanc. Au déjeuner, un secret bien gardé de la gastronomie du pays : la muxama, filet de thon salé et séché au grand air, comme un jambon, servi en