Parmi les plus indélébiles brûlures imprimées à nos cerveaux par Only Lovers Left Alive, nouveau film de Jim Jarmusch (en salle depuis mi-février), figure celle laissée par la musique jouée par le personnage principal, Adam, une espèce de rockeur pluricentenaire. Et si la somptueuse bande-son de cette histoire de vampires esthètes mêle les standards vintage de Charlie Feathers ou Wanda Jackson aux œuvres de revivalistes actuels tels White Hills et Black Rebel Motorcycle Club, elle s'irrigue surtout d'une procession d'hymnes funèbres, comme irradiés par la lune, signés par un certain Jozef van Wissem.
Rouge sang. Malgré une quinzaine d'albums parus depuis 2000, on connaît trop peu ce dernier en France, si bien que la parution de la musique du film (en CD et double vinyle rouge sang) fait un parfait prétexte pour rencontrer l'auteur de cette partition couronnée à Cannes par le prix de la meilleure musique originale, où les sonorités pincées d'un instrument anachronique, le luth, enlacent les bourdonnements furieux des guitares électriques.
La guitare, Van Wissem a commencé à en jouer très jeune, dans les rues de Maastricht (Pays-Bas), où il est né et a grandi. Au début des nineties grunge, il tient un bar à Groningue, «une sorte de coffee-shop punk», où il fraie avec quelques éminences électriques d'alors, notamment Dinosaur Jr. En 1994, jeune trentenaire en crise, écœuré à force d'extravagances d'un style de vie «trop