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Analyse

Queen B, la société du réceptacle

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Les albums de la Texane se font l’écho des courants de la musique black américaine.
La musique de Beyoncé n'appartient à aucun style, passée par le r'n'b funky, la soul, les beats électroniques et la pop Disneyland, avec des réussites et des errances. (Photo Columbia. Sony Music)
publié le 11 septembre 2014 à 20h16

Chez une chanteuse à visées aussi commerciales, qui contrôle son image avec une précision toute militaire, la comédie et la musique ne font qu’un. Beyoncé est toujours en représentation. D’elle-même tout d’abord, filant son storytelling de jeune femme bosseuse, qui excelle dans le chant comme dans la danse. Mais aussi du grand récit de la musique noire américaine, auquel elle se raccroche régulièrement.

Le geste qui a scellé ce lien de sang se passe dans Cadillac Records, un film raté de 2008 qui raconte l'histoire de Chess Records, un label de Chicago qui accueillit beaucoup des grands noms des années 40 aux années 60 - Chuck Berry, Muddy Waters, Howlin' Wolf. Beyoncé y joue Etta James, et le temps s'arrête lorsque, poussée jusqu'à la 15e prise par son producteur, elle s'élance pour une version à nu d'All I Could Do Was Cry. Elle est sublime, parvenant à faire oublier les petites chansons des Destiny's Child comme ses costumes de starlette du r'n'b pour devenir pleinement Etta James, grande gueule fracassée de la soul qui fumait clope sur clope et se coltinait aux poings chacune de ses chansons. En trois minutes et quelque, Beyoncé a gagné ses galons d'enfant de Chess Records et de la Motown.

Modèle Jackson. «Elle connaît bien cette histoire musicale, explique Franck Freitas, doctorant en sciences politiques, qui travaille sur les questions de genre, de race et de classe dans la société américaine au