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Libération
Cordes

Des violons dingues

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Comment dénicher l’instrument avec lequel partager sa vie? D’abord en trouvant un mécène, telles ces banques qui achètent et prêtent les pièces les plus recherchées. Mais, par-delà la question du prix, ce qui fait l’âme du violon, c’est surtout celui qui en joue. Trois musiciens témoignent.
Renaud Capuçon, le 16 décembre à Paris. Son violon, un guarnerius de 1737, appartient à la Banque suisse italienne. (Photos Yann Rabanier)
publié le 19 décembre 2014 à 19h56

On connaissait des violonistes. On les voyait se balader avec leur instrument, leur étui comme une pharmacie, avec toujours à l’intérieur son bloc de colophane, cette sorte de résine indispensable au glissement de l’archet. On en avait vu se précipiter sous un parapluie à la première goutte de rosée : attention, fragile ! Et puis on avait entendu des histoires effrayantes, de douaniers manipulant l’engin comme des sagouins, de violonistes attachés à leur violon par des menottes par peur de le perdre. On avait aussi eu vent de prix délirants.

On aimait les entendre parler de l’âme du violon, qui porte bien son nom puisque c’est une pièce d’épicéa placée dans la caisse de résonance qui, au millimètre près, modifie le timbre de l’instrument - l’outil de choix du luthier s’appelle une «pointe aux âmes». On sentait bien qu’il y avait là quelque chose de pas banal.

Il y a dix ans, avec Poulet aux prunes (repris en film en 2010), la bédéiste Marjane Satrapi avait popularisé les angoisses d'un joueur de târ iranien qui allait de marchand en marchand pour essayer de remplacer son luth brisé. En vain. Les violonistes aussi semblent passer une partie de leur vie à chercher un instrument : il y en a peut-être qui ne le trouvent jamais. Ne reste pas moins qu'un violon, c'est comme un conjoint. On le sort en ville, au concert, et on passe une partie de la journée avec, à s'exercer. Autant donc l'aimer.

En discutant avec les violonistes, on s’aperçoit qu’il n’y a pas deux histoires d