Les journalistes adorent raconter qu’il a été, un temps, conducteur de tram à Helsinki. Au-delà de ce point de détail presque romantique, Jaakko Eino Kalevi (ses trois prénoms), est désormais entièrement concentré sur sa musique. Son album éponyme, tout juste sorti sur le label anglais Domino (Arctic Monkeys, LA Priest, Hot Chip), indique que le jeune homme, à l’allure juvénile, a bien des cordes à son arc. Trois ans après son premier EP, qu’il place lui-même dans la vague «jazz», ce multi-instrumentiste solitaire produit une pop électronique en anglais et en finnois, douce et lyrique.

«J'ai fait ce job (de conducteur de tram ndlr) quand je suis parti vivre à Helsinki en 2006. J'ai déposé ma candidature pour des tas d'emplois et il n'y a que là que j'ai été engagé. J'ai toujours été concentré sur la musique. Je ne suis pas allé à l'université. Il me fallait un job qui me permette de composer et de jouer. Conduire des trams m'a apporté beaucoup de liberté à ce niveau-là. C'était très agréable. Berlin est une ville plus libre, moins organisée qu'Helsinki. En Finlande, les bars ferment très tôt, on ne peut pas acheter d'alcool après 21 heures. La vie nocturne est restreinte. Il faut être bien organisé pour prendre une cuite et faire la fête. On ne peut dire tout à fait la même chose de Berlin.

Je n'ai pas vraiment donné de ligne directrice à cet album de ce point de vue là. Mes textes évoquent des sujets très différents. J'écris sur des instants, des captures du temps. Deeper shadows parle de liberté, et de l'ignorance dans le bon sens du terme, lorsqu'on est concentré sur l'essentiel. Don't ask me why décrit un moment, celui du début d'une conversation pendant laquelle on ne veut pas trop s'expliquer. Ikuinen purkautumaton jännite, qui clôt l'album, signifie voltage, tension, suspense qui ne se déclenche jamais. La chanteuse est Sonja Immonen, ma fiancée.

Deeper shadows de Jaakko Eino Kalevi.

«Je joue de pas mal d'instruments, guitare, basse, batterie, synthé. Pour cet album, j'ai fonctionné comme assez seul, sauf pour le saxophone, qui a été confié à Jorja Chalmers et les voix. Je fais du saxo mais je ne suis pas assez bon pour ce que je veux que ça apporte à ma musique. La majeure partie du temps je commence à composer par le rythme, le beat, puis les couches d'autres instruments. La voix arrive en dernier même si certaines chansons naissent forcément d'une voix, ou d'un chant.

«Je ne connais pas François de Roubaix. Je peux comprendre que le morceau Ikuinen Purkautumaton Jännite, le dernier du disque, évoque une bande originale de film. Si je devais donner une référence cinématographique, ce serait la bande-son de Joy, un film érotique canadien sorti en 1983.