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Libération
Interview

«Miley Cyrus est nue dans la vie de tous les jours, même dans le travail»

Chanteur des Flaming Lips et ami de Miley Cyrus, Wayne Coyne éclaire la personnalité incomprise de la star.
publié le 28 décembre 2015 à 17h31

Wayne Coyne, 54 ans, leader des turbulents The Flaming Lips, évoque, depuis sa maison d’Oklahoma City, sa collaboration avec Miley Cyrus, dont il a cosigné le dernier album.

Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Elle disait souvent qu’elle était fan de notre musique. Elle m’a souhaité un joyeux anniversaire sur Twitter. On a commencé à s’envoyer des SMS tous les jours. Et elle nous a invités à jouer avec elle sur son Bangerz Tour. Mais comment est-elle perçue en France ? Est-elle populaire ?

Oui, très. Mais on se demande si ce qu’elle produit aujourd’hui est mû par le marketing ou par un véritable souci de changer.

Je vois très bien. Aujourd'hui, si vous êtes jeune, soit vous l'adorez, parce que vous avez grandi avec elle. Soit vous la méprisez parce qu'elle représente tout ce qui est artificiel, lié à Disney et à Hollywood. Beaucoup de gens me demandent pourquoi je me suis rapproché d'elle. Depuis qu'on se connaît - ça doit faire deux ans -, on essaie continuellement de faire de nouvelles choses. Pour moi, elle n'a rien à prouver, mais aux yeux de beaucoup, elle aura toujours à faire ses preuves parce qu'elle est vue à travers le prisme d'Hannah Montana [personnage d'une production Disney que Cyrus a interprété, ndlr] et de l'époque Bangerz. Je ne sais pas si elle y reviendra un jour. Je ne sais pas si elle s'intéresse vraiment encore à son image. Elle essaie de passer à un autre stade, de dépasser tout ça.

C’est paradoxal, car son image est très forte, à la fois sexuelle et bizarre.

Je ne suis pas sûr qu’il s’agisse tellement de sexe. Il n’y a pas de limite, mais elle n’essaie pas d’être sexy. Même en 2013, quand elle twerkait avec Robin Thicke, elle ne voulait pas ressembler à une strip-teaseuse, mais plutôt à un truc absurde et drôle. Elle sait que c’est de la provocation parce que c’est une jeune femme séduisante. Je ne sais pas si vous avez vu les images d’elle avec un gode ceinture et de faux seins pendant nos concerts. On voulait juste se marrer sans y accoler un caractère sexuel. C’est ce nouvel aspect d’elle que les gens ne comprennent pas. Elle aura du mal à se débarrasser de cette image. Mais ceux qui aiment sa musique s’intéresseront à autre chose.

On voit bien tout de même qu’elle essaie d’être dérangeante.

On a tendance à l'oublier mais être nu, c'est juste quelque chose de naturel ! Elle ne le fait pas uniquement pour les photos. Elle est comme ça dans la vie de tous les jours, même dans le travail. Elle ne vit pas comme la plupart des Américains, c'est certain. Du coup, c'est encore plus dur pour les gens de concevoir que sa musique peut être sérieuse et sensible. Elton John faisait la même chose dans les années 70. Son comportement paraissait très absurde. Il était homo, flamboyant, il chantait des morceaux sensibles. Cette combinaison faisait simplement partie de sa personnalité. Aucun des artistes que je connais n'avait fait d'album quand ils avaient 23 ans. Miley en a fait cinq. Sa famille ressemble un peu à la mienne : une grande famille, pleine de freaks, qui font de la musique. Ils sont même plus freaks qu'ils ne sont musiciens.

Parlez-nous de cette obsession du lait. Vous faites un Milky Milky Milk Tour, vous en balancez sur le public, elle en fait couler sur son visage dans un clip…

On ne peut pas parler d'obsession. Un jour, Miley était saoule au téléphone, et j'ai cru qu'elle disait le mot milk. Elle en a fait un sample où elle répète «milky milky». C'est devenu une sorte de slogan. Je lui ai dit ce serait drôle de se balancer du lait. C'est comme ça qu'on a eu l'idée d'un concert où tout le monde serait à poil. Ce sera plutôt une vidéo qu'un concert.

Sortir un album gratuitement, comme elle l’a fait avec Miley Cyrus and Her Dead Petz, perturbe les règles d’usage de l’industrie.

Avec Miley, nous voulions faire quelque chose de plus radical. Je ne suis pas sûr qu’elle veuille encore faire partie d’une machine marketing planétaire, jouer dans des stades… Notre collaboration va durer encore quelques années. Nous aimerions faire des dates au printemps et cet été, à l’étranger, mais ça ne sera pas une grande tournée mondiale. Tout est possible avec elle. Mais elle n’est pas manipulée. Elle est entièrement responsable de ce qu’elle fait. On pense l’inverse parce que c’est une pop star et que beaucoup d’autres sont téléguidées par leur entourage. Miley va encore beaucoup surprendre le monde.