Comment, en 2016, produire de la techno en réussissant à exister, coincé entre les deux variantes dominantes du genre, le marteau de la techno industrielle à la berlinoise, telle que professée au club Berghain, et l’enclume commerciale de l’EDM, qui a contaminé tout le champ de la dance music ? En faisant preuve de constance, au risque d’avoir l’air de peiner à se renouveler.
Basé à Cologne, le label Kompakt, qui a fêté en 2013 ses 20 ans d'activisme (une éternité en matière de musique électronique), a adopté très tôt une identité sonore qu'il n'a cessé de creuser : une techno mélodieuse lorgnant outrageusement la pop, faisant une utilisation immodérée des boucles et usant souvent de vocalistes. Nouvel arrivant au sein de cette écurie, le duo italien Hunter/Game se conforme à ces codes tout en leur apportant sur son premier album, Adaptation, une touche de modernité salvatrice. Membres de la très active scène milanaise, Emmanuele Nicosia et Martino Bertola ont explosé en 2015 avec deux singles ( Hexagon et Adaptation) qui ont impressionné la galaxie électronique par la précision et l'efficacité de leurs productions.
Subtile et charnelle, leur musique possède une légère touche trance, accrochant l'auditeur avec des éléments pas forcément du meilleur goût, mais suffisamment finement traités pour leur retirer toute vulgarité. Sans céder à la facilité, Nicosia et Bertola élargissent leur palette, flirtant parfois avec le côté obscur (Origins), ou ralentissant les tempos (Hide) et usant sans réserve de nappes et de boucles rythmiques pour pousser le caractère hypotonique de leur musique à son paroxysme. Déroutant d'efficacité malgré son manque de radicalité et son style méga-épuré, Adoption porte par ailleurs des thématiques ambitieuses (et/ou fumeuses), les Italiens ayant baptisé leur disque Adaptation, comme «l'adaptation de l'être humain au monde urbain moderne, l'adaptation de la musique à une ère technologique collective devenue le manifeste de notre génération». Ce qui n'empêche pas l'album d'être excellent.
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