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Libération

Pros de la provoc

Mais qui sont les héritières de la sulfureuse Nina Hagen, de retour sur scène à Paris ?

Nina Hagen (Photo Jim Rakete)
Par
Patrice Blanc
Publié le 11/03/2016 à 17h51

Année 1979. En prodiguant en direct à la télévision autrichienne, gestes à l’appui, des conseils de masturbation, Nina Hagen déclencha un scandale planétaire (nous sommes en 1979, on le rappelle), mais la diva punk gagna surtout instantanément une immense popularité, bien plus importante que sa musique. Alors que la chanteuse allemande joue jeudi à Paris, beaucoup d’artistes ont tenté de faire mieux… ou pire. Et parfois même en distillant quelques messages sous la provoc.

1 - Peaches partouze lesbienne

A la fin des années 90, lorsque Gonzales ne se prenait pas encore pour Chopin, il dévastait les scènes à moitié nu avec sa copine, canadienne également, Peaches, qui se trimballait, elle, en mini-slibard rose. Aujourd'hui, tandis que son copain travaille son piano, Peaches continuer de pratiquer à outrance la simulation d'actes sexuels en tout genre. Sur scène, mais surtout dans ses clips. Son album Rub, sorti à l'automne, apparaît même comme le seul prétexte pour tourner des vidéos sans cesse plus délirantes. A l'image de Rub, son dernier exploit en date, dont on encourage vivement le visionnage de la version non censurée. On peut y apercevoir, au milieu d'une partouze lesbienne, la tête de Peaches prise en sandwich par deux gigantesques paires de seins. Une bonne manière pour elle de réaliser ses fantasmes.

2 - Brooke Candy pornstar alien

Quand elle apparaît en 2012 avec le clip de Das Me, la rappeuse Brooke Candy développe une imagerie délicate : poses suggestives, tenue de pornstar alien, emblème en forme de feuille de cannabis, on y croise la jeune femme crachant du champagne en pelotant les fesses de ses copines ou traînant un enfant en laisse. On sait qu'avant de devenir strip-teaseuse l'interprète d'I Wanna Fuck Right Now a été élevée par un père directeur financier du légendaire magazine porno Hustler. Une image trash aujourd'hui reprise en main par Nicola Formichetti, qui avait forgé en partie l'identité visuelle de Lady Gaga. La guerrière exhibitionniste plairait certainement à Hagen, mais pas sûr que ce virage radical pour viser les charts (pour l'instant sans succès) ne séduise la jusqu'au-boutiste Nina.

3 - Orties jumelles dark et trash

Une éphémère sensation de 2012, qui a certes légèrement débordé sur 2013. Les jumelles à l'origine du projet, Kincy et Antha, avaient l'habitude de déclarer : «Si on n'avait pas fait Orties, on se serait butées.» La mort, la défonce, le sexe sont au centre de leur rap electro-dark que l'on peut résumer dans cette phrase : «Je m'en fous du 69 /Je veux juste du 666», entendue au détour d'un de leurs morceaux phares à l'allure de manifeste féministe, Plus putes que toutes les putes. Dans l'étrange clip kitsch et trash (mais tourné à Etretat…) Soif de toi, elles se font asperger d'un liquide blanchâtre tout en déclamant : «Fais-moi la mort.» Toujours la même obsession. «Orties nique tous tes copains» était le slogan du duo. Quelques années après, on a plutôt l'impression qu'elles se sont surtout niquées elles-mêmes.

4 - Amanda Palmer pose politique

Parmi toutes les jeunes femmes citées ici, l'Américaine Amanda Palmer est peut-être la plus proche descendante de Nina. Au sein du groupe cabaret-punk The Dresden Dolls, puis aujourd'hui en solo, Palmer crie fort des idées qui ne plaisent pas à tous. De ses réflexions sur l'industrie de la musique - elle a engrangé beaucoup d'argent grâce au financement participatif - à sa bisexualité proclamée, en passant par un certain goût pour la nudité libératrice et revendicatrice, sa pilosité et son féminisme radicalement pro-sexe, elle est ce qu'on appelle en anglais un free spirit. Les concerts des Dresden Dolls - de vraies performances empruntant aux disciplines du cirque - et le look excentrique de l'Américaine - à mi-chemin entre le punk et John Waters - en font une Hagen des temps modernes.

5 - Miley Cyrus petite mature

On avait d'abord pensé que Miley Cyrus n'était que poupée, déshabillée par un marionnettiste - probablement vieux, blanc et bedonnant - de l'industrie du disque. Puis les prises de risque ont suivi les provocations faciles. Aux joints sur scène, clip exhibitionniste réalisé par papy Terry Richardson et mimes de coït devant la caméra, ont succédé des prises de position féministes et des choix de carrière étonnants. Qui aurait pensé en voyant la jeune femme lécher lascivement un marteau qu'elle sortirait deux ans plus tard un album (Miley Cyrus & Her Dead Petz) presque entièrement chapeauté par Wayne Coyne des Flaming Lips ? Un disque qu'elle défendra sur scène aux MTV Video Music Awards accompagnée d'une trentaine de drag-queens flamboyantes. C'est ce qu'on appelle un suicide commercial plein de panache.