Ce n'est pas toujours marrant, la vie d'artiste. Il y a les hauts, les bas, les moments où l'on a besoin de prendre du champ ou du recul pour se réinventer. C'est à ça que servent les side projects, littéralement les «projets à côté», équivalents en musique du spin-off dans les séries télé. Souvent, cela prend la forme d'un album solo d'un des musiciens du groupe, mais parfois l'histoire est plus complexe…
1- XTC The Dukes of Stratosphear
L'aventure de The Dukes of Stratosphear et de XTC est un peu l'équivalent musical de Romain Gary et Emile Ajar. Au mitan des années 80, les Britanniques de XTC, dont la carrière avait décollé avec le tube Making Plans for Nigel, ont échoué à devenir un groupe de new wave populaire. Leurs deux derniers albums, Mum mer (1983) et The Big Express (1984), sont des flops. Pour se changer les idées, ils enregistrent quelques chansons en pastichant leurs influences dans le plus pur style psychédélique. En ayant pris soin de se cacher derrière des pseudonymes, ils sortent ces titres en 1985 sous le nom The Dukes of Stratosphear. Le succès immédiat de 25 O'Clock va relancer la carrière de XTC, que son label était prêt à lâcher. La légende prétend que certains critiques ont été convaincus d'écouter la réédition d'un disque oublié des années 60. Un second Dukes of Stratosphear sortira même en 1987.
2- The Stranglers The Purple Helmets
Les hommes en noir de The Stranglers («les étrangleurs») ont toujours eu une réputation un peu lourde à porter. Consommation d'héroïne, concerts qui virent à l'émeute, galères à répétition ou concept album baptisé la Folie… ces garçons n'ont jamais été là pour rigoler. Sauf quand, pour se détendre, trois de ses membres, le bassiste (et chanteur) d'origine française Jean-Jacques Burnel, le guitariste John Ellis et le clavier Dave Greenfield, forment The Purple Helmets pour jouer discrètement dans les bars des reprises des Kinks, des Who ou des classiques blues et garage. Après une série de concerts, notamment aux Transmusicales de Rennes en 1986 (où les rejoint Laurent Sinclair, ancien de Taxi Girl), deux albums sortiront, en 1988 (chez New Rose, toute une époque) et en 1989.
3- Death Cab for Cutie The Postal Service
En 2018, le premier album du quatuor indie-rock américain Death Cab for Cutie fêtera ses 20 ans. De ce côté-ci de l’Atlantique, on voit le groupe de Ben Gibbard comme gentillet et ultraclassique, mais, sur l’autre rive, Death Cab est une institution. Pourtant, Ben Gibbard a fait plus intéressant dans sa carrière.
Au début des années 2000, il crée The Postal Service avec Jimmy Tamborello, connu pour quelques excellents disques electro-pop sous les noms de Dntel ou Figurine. Leur unique album, Give Up, mêle à merveille écriture pop classique et arrangements électroniques ambitieux. Le second, évoqué en 2007, ne verra jamais le jour, et le duo restera mutique jusqu'à une série de concerts en 2013, accompagnés de deux nouveaux titres pour célébrer les 10 ans de Give Up, devenu mythique entre-temps. A en croire Ben Gibbard, pourtant, ces concerts étaient les derniers.
4- Radiohead Atoms for Peace
C'est à un mélange de «supergroupe» et de side project, deux amusants passe-temps de l'industrie de la musique, qu'on a ici affaire. Atoms for Peace, composé de Tom Yorke, de Radiohead, du bassiste de Red Hot Chili Peppers, Flea, du producteur Nigel Godrich, du batteur de R.E.M. Joey Waronker et du percussionniste Mauro Refosco, n'a été monté en 2009 que pour permettre à Tom Yorke de jouer live les morceaux de son album solo The Eraser (2006).
Pourtant, Atom for Peace deviendra un vrai groupe en 2013 avec l'album Amok, né d'expérimentations électroniques de Tom Yorke retravaillées en groupe. Le chanteur de Radiohead y semble plus libre que jamais, et une luminosité inédite transperce une série de morceaux plongés dans une transe électronique salvatrice. Bientôt la suite ?
5- Arctic Monkeys The Last Shadow Puppets
En 2008, Alex Turner, l’idole des jeunes Anglaises, se remet à peine du triomphe du deuxième album de son groupe Arctic Monkeys et annonce la naissance d’un projet avec Miles Kane, leader des moins prestigieux Rascals. The Last Shadow Puppets est né et ajoute à ses rangs le producteur James Ford, moitié du duo électronique Simian Mobile Disco et faiseur de miracles pop (Florence and the Machine, Haim…).
Le premier album, The Age of the Understatement, cavalcade pop-rock ébouriffante richement arrangée par le violoniste Owen Pallett, bénéficie d'un culte certain aujourd'hui. Attendue par de nombreux fans, la suite, dans la même veine lyrique qui faisait le sel du précédent, s'appelle Everything You've Come to Expect. Elle vient de sortir. Pour le même succès ?