Menu
Libération

We Are Europe : l’union sur de bonnes basses

Les Nuits sonores, comme leur pendant prospectif European Lab, s’inscrivent dans ce projet continental, qui porte une réflexion sur les politiques publiques et culturelles.
par Maïté Darnault, Correspondante à Lyon
publié le 3 mai 2016 à 19h31

De la Norvège à la Grèce, en passant par l’Espagne, l’Autriche, l’Allemagne ou la Serbie, le forum lyonnaise European Lab de Lyon possède une myriade de cousins. Ce sont eux que le projet We Are Europe fédère pour trois ans. De 2016 à 2018, huit festivals européens et leurs forums concomitants vont mener de concert une réflexion sur la culture indépendante et ses sources de financement, sur l’évolution des politiques publiques et l’émergence d’une nouvelle génération d’entrepreneurs dans ce domaine.

L’European Lab, c’est donc le pendant prospectif des Nuits sonores de Lyon. Lancé en 2011, huit ans après la création du festival de musique electro, ce rendez-vous mêle conférences, débats et workshops sur le thème de l’innovation culturelle. En parallèle de la programmation musicale, il se veut un carrefour des problématiques qui agitent le secteur, tant du côté des professionnels que du grand public.

Cartographie. Après avoir contribué à la mutation de la scène et de l'industrie musicales mondiales, c'est au chevet du modèle culturel européen que l'electro passe désormais une partie de ses nuits. «La génération née de la révolution techno a un rapport particulier à l'Europe, très intime, estime Vincent Carry, président d'Arty Farty, qui produit les Nuits sonores à Lyon et pilote le projet We Are Europe. Elle a été incroyablement mobile, depuis le début des années 90 et a inventé sa propre carte sensible de l'Europe, au-delà des frontières administratives, incluant bien sûr la Turquie, mais aussi le Maghreb, toute l'Europe de l'Est…»

La cartographie de We Are Europe déborde elle aussi le cadre de l’UE, comptant parmi ses partenaires la Norvège et associant également des pays candidats, tels l’Albanie ou le Kosovo. Le coup d’envoi de cette fédération inédite a eu lieu en avril à Belgrade, lors du festival Resonate. C’est aujourd’hui au tour des Nuits sonores-European Lab de mener le bal à Lyon, avant Sónar (Barcelone) en juin. En toute logique, We Are Europe profite de la manne européenne. Près d’un des deux millions d’euros du budget de l’événement provient d’une subvention accordée par le nouveau programme de l’UE, Creative Europe.

«Lourde mission». «L'Europe reste un lieu des possibles, où la diversité, les collaborations dépassant le cadre national sont encore fertiles», se félicite Bernhard Steirer, cofondateur du festival autrichien Elevate, en charge d'une carte blanche à l'European Lab. Et de pointer l'urgence politique : «C'est vraiment le moment d'activer les réseaux pour encourager la mobilité des citoyens européens, comme un contrepoint aux frontières, au nationalisme, à cette Europe-là qui est aussi en train de se développer.»

Une «lourde mission» qui incombe, selon Vincent Carry, à cette génération des «European natives» : «Nous devons nous souvenir que nous aimons cette Europe, que nous en sommes l'essence même. Sandro Gozi, le secrétaire d'Etat italien aux Affaires européennes, vient de le rappeler : Umberto Eco avait prédit il y a plus de vingt ans que l'Europe serait construite par les couples Erasmus. Aujourd'hui, ils ont donné naissance à plus d'un million d'enfants !» Les enfants de la techno.