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Libération
Critique

Cyril Mokaiesh la lutte, c’est classe

Dans son troisième album, le chanteur parisien affine une colère qui ne s’affaiblit pas.
publié le 27 janvier 2017 à 17h06

Au XXsiècle, on appelait ça «la chanson engagée». Le genre avait quasiment disparu des radars de la chanson française, les rappeurs ayant repris le flambeau des Ferrat, Ferré et autre Lavilliers pour dézinguer au napalm les tares de notre société. Lavilliers justement, sa dernière apparition, à 70 ans, il vient de la faire en featuring (comme on dit dans le rap) sur un titre de Cyril Mokaiesh, la Loi du marché. Un morceau 100 % chanson et 100 % engagé où l'artiste de 31 ans dénonce la finance folle, l'austérité, l'Europe, l'égoïsme généralisé… C'est avec ce titre que le Parisien démarre son troisième album en solo (sans compter un disque de reprises dédié aux «naufragés» de la chanson française datant de 2015).

Passé par le sport, il fut champion de France de tennis junior, aussi bien que par le rock, avec un groupe qui portait son nom, Mokaiesh, cet insoumis s'est fait immédiatement remarquer avec son premier album solo, Du rouge et des passions, sorti en 2011, notamment grâce à la chanson Communiste, aussi écorchée qu'échevelée. Si le succès public n'est pas vraiment au rendez-vous, nombreux s'accordent à reconnaître dans le romantisme maximaliste de l'artiste une des plus belles promesses de la chanson française actuelle.

Une promesse largement tenue dans ce nouveau disque, pas plus sobre que les précédents mais certainement mieux maîtrisé. Clôture sent la colère, l'urgence et la passion. Avec cette véhémence, parfois embarrassante, qui le caractérise, Cyril Mokaiesh n'évoque que deux sujets, notre époque et l'amour. Et l'un n'a pas l'air plus en forme que l'autre. Mais si la grandiloquence de ses albums précédents pouvait rebuter, difficile de ne pas être durablement secoué par le souffle et paradoxalement la finesse de ce nouveau disque exaltant, qu'il n'est pas besoin d'être mélenchoniste pour apprécier.

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