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Dans les bacs

De Jacco Gardner à Debussy, cinq sons de sortie ce Black Friday

My Brightest Diamond, Oneohtrix Point Never, Jacco Gardner, Reckonwrong et Roger Muraro qui joue Debussy et Messiaen : ça sort aujourd’hui et c’est à écouter avec ou sans modération.
(DR)
publié le 23 novembre 2018 à 6h37

Celui à écouter pour faire (ou refaire) un tour en 1967

Jacco Gardner, Somnium (Full Time Hobby/PIAS)

Pour son troisième album, le plus brillant des baroques des Pays-Bas contemporains a décidé de s'abstenir de chanter. En quel honneur ? Celui du livre auquel il emprunte son titre, le Songe ou l'Astronomie lunaire (Somnium, seu opus posthumum de astronomia en latin dans le texte), roman de science-fiction avant l'heure écrit au XVIIe siècle par le grand astronome Johannes Kepler, dont Jacco Gardner a tenté de recréer les paysages déments avec «des moyens soniques, presque alchimiques». Bon voyage à toutes et à tous.

Celui à écouter en frottant la boule à facettes

My Brightest Diamond, A Million and One (Rhyme & Reason Records)

Jusqu’ici, l’Américaine Shara Nova était surtout réputée pour la délicatesse de sa pop arty, toute en pizzicati et voix de tête soyeuses, comme du rock progressif doucement dément et joué dans une pièce capitonnée par un orchestre de chambre. Pour son cinquième album sous pavillon My Brightest Diamond, l’ancienne perle du backing band de Sufjan Stevens se refonde totalement sur un mode électronique, putassier sur les bords, quelque part entre Visage et Soul II Soul. Faut écouter.

Celui à écouter enfermé chez soi, loin de tout commerce, au lieu d’aller s’acheter un écran plat en ce funeste Black Friday

Oneohtrix Point Never, Love In The Time Of Lexapro (Warp)

Dixit Wikipedia : «l'escitalopram, commercialisé dans divers pays sous les noms de Lexapro, Cipralex, Sipralexa et Seroplex, est un antidépresseur inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine […] utilisé dans le traitement de la dépression et de l'anxiété.» On ne garantit pas une seconde que l'écoute de ce nouveau mini-album du plus messianique des producteurs de pop électronique actuelle permette de lutter efficacement contre le blues du mois de novembre (ou pire), mais le portrait qu'il dépeint de notre temps est, une fois de plus, saisissant de fidélité. Inclus dans le mini-album : un remix pas loin d'être sublime du grand Ryuichi Sakamoto.

Celui à écouter en se grattant la tête

Reckonwrong, Whities 018 (Whities)

Les occasions de se poser des questions sur un dancefloor house ne sont pas légion, alors remercions une fois de plus l’étonnant Reckonwrong de nous gratifier d’un tube de musique à danser auquel on ne comprend pas grand-chose, ni son titre ni la mécanique qui rend son funk si irrésistible. Vivement l’album, s’il arrive un jour.

Celui à écouter en se disant que tout a une fin, même les hommages centenaires

Roger Muraro, Debussy et Messiaen (Harmonia Mundi)

L'année prend fin et la célébration du centenaire (de la mort) de Debussy aussi. L'occasion, enfin, de signaler le vaste travail d'hommage qu'a fourni Harmonia Mundi durant ces derniers mois. Après avoir fêté ses 60 ans, le label a sorti pas moins de dix nouveaux CD consacrés au maître sombre de la Belle-Epoque. Préludes, Mélodies, Suite bergamasque, Sonates, Debussy… et le jazz, sur instruments modernes ou d'époque, en formation chambriste ou grand orchestre (Philharmonia Orchestra, les Siècles), avec des artistes comme Antoine Tamestit, Isabelle Faust, Nikolaï Lugansky ou encore Pablo Heras-Casado. Bref, les petits plats dans les grands. Cette dernière fournée met en lumière le travail de Roger Muraro sur les Etudes, qu'il complète en les associant à une œuvre de Messiaen. D'une part car les deux compositeurs se marient bien. Ensuite car Messiaen l'ornithologue s'était lancé dans la composition d'une pièce en hommage au centenaire (de la naissance) de Debussy : Fauvettes de l'Hérault, jamais achevée, et qu'on peut entendre sur ce disque.