«C'était terrible, Ian Curtis revenait toujours dans la conversation. Martin n'arrivait pas à s'en détacher». Hannett allait mal. La mauvaise graisse, la grise, le gagnait ; loin des nappes de basse plombées, il la dissimulait sous des nippes informes. Il portait la barbe et les cheveux longs, une casquette de base-ball qui lui donnait l'allure d'un vieux freak brother. On le croisait à nouveau dans les studios de la ville, mais on le disait ou savait irrécupérable, miné par les défonces et l'alcool, rongé de remords : il est définitivement mort en fin de semaine dernière, d'une crise cardiaque pendant son sommeil. A l'âge de quarante-deux ans.
Enfant du Northside, élève du Xavian College que fréquenta aussi Burgess, adepte des Doors, de Tom Jones ou de Hendrix qu'il allait attendre à la sortie des studios de la BBC, Martin Hannett a commencé par se consacrer à la chimie et s'est tardivement penché sur le rock, au milieu des années 70, sans idée précise. D'abord en bassiste d'un groupe obscur (avec un certain Paul Young, qui sévit aujourd'hui chez Mike & The Mechanics), puis en organisateur de concerts, manager d'une coopérative de musiciens et ingénieur du son avec Steve Hopkins. C'est dans ce domaine qu'il décide de pousser l'expérimentation, la scène punk lui fournissant un laboratoire adéquat : en janvier 1977, Hannett produit le premier EP des Buzzcocks, groupe phare de Manchester, Spiral Scratch. Un manifeste.
La ville s’anime. En mai 1978, le