De Cocteau à Isamu Noguchi, de Julien Levy à Man Ray, les beaux gosses des années 30 s’affichent au Jeu de paume. Derrière l’objectif, Berenice Abbott (1898-1991), une Américaine amoureuse de la France et de la liberté qu’elle y trouva lors de l’ouverture de son studio, rue du Bac, à Paris. Portraitiste, donc, mais surtout femme généreuse, cherchant toujours, lors de ses rencontres, à connaître ses interlocuteurs, esprits célèbres ou modestes anonymes, peu importe. C’est grâce à elle que ses compatriotes découvriront Eugène Atget qu’elle croise juste avant qu’il ne meure, et dont elle exporte des milliers de tirages et de plaques négatives aux Etats-Unis. Elle appartient d’ailleurs à la même lignée, lucidité et non-conformisme dans la prise de vues, avec un pied dans la réalité de l’époque, entre conquête de l’air et crise financière.
Paquebot. Choc à son retour à New York, en 1929. Comme l'exprime le titre de son ouvrage le plus connu,Changing New York (1), la ville ne cesse de tanguer, chantier permanent qu'elle immobilise pendant dix ans. Un travail phénoménal qui rend autant hommage aux ouvriers qu'à l'architecture extravagante, gratte-ciel, enseignes de boutiques, ponts. Certaines images sont connues, comme celle de Manhattan de nuit, ressemblant à un paquebot de luxe en pleine mer ; d'autres, non, ainsi son scrap book personnel, riche de petits tirages, des merveilles qui montrent sa curiosité pour la vie de chaque quartier (Chinatown,