Les veines de l'Amérique latine sont toujours ouvertes, mais à quoi ressemble le sang qui en jaillit depuis qu'il semble moins touché par ce qu'Octavio Paz appelait «l'infection idéologique» - qu'elle vienne de la gauche révolutionnaire ou de la droite bottée ? L'exposition monstre de la Fondation Cartier présente, à travers un demi-millier d'œuvres de toutes sortes, un panorama photographique et conceptuel de la vie de cet univers depuis un demi-siècle. C'est un épuisant kaléidoscope sur deux niveaux, un patchwork patrimonial proliférant comme l'Orénoque entre souvenirs, témoignages et combats.
La partie la plus militante, «Informer-Dénoncer», est au sous-sol - comme des prisonniers dans une cave. S’il excède toute capacité de digestion documentaire et esthétique, le parcours révèle quelques lignes de force. La «quantité» sud-américaine est ensorcelée par le kitsch, la violence et l’excès : plus le cadre qui la saisit est sobre et serré, plus le document y trouve l’espace de sa beauté - et de sa fiction. Il est souvent réduit à sa plus simple expression.
Dégringolade. Première qualité : donner à voir le travail de photographes qui, pour l'essentiel, sont inconnus ici. La plupart sont nés après la génération du «boom», du Che et des géants photographiques, de Manuel Alvarez Bravo à Sergio Larrain. Le plus jeune des soixante-douze artistes exposés, Iñaki Bonillas, est né en 1981 à Mexico. Il installe des cartes de visite, vraies o