Tiens, mais c’est la fameuse Goulue - la somptueuse danseuse du Moulin rouge des années 1880 immortalisée par Toulouse-Lautrec - embrassant son fiston à casquette qui part fièrement à la guerre. Peut-être avec l’idée de venger son grand-père, mort des suites de ses blessures de celle de 1870 ?
En tout cas, elle a un peu changé, la Goulue. En 1914, on ne reconnaîtrait pas la french-cancaneuse qui finissait les verres des clients (d’où son surnom) dans cette grosse petite femme, un chien dans les bras, entourée d’hommes comme autrefois… Mais qui cette fois ont plutôt l’air de regarder le photographe, Charles Lansiaux, une cinquantaine d’années à cette époque, dont la Galerie des bibliothèques de Paris propose une rétrospective délicieuse «Paris 14-18, la guerre au quotidien» : 200 photos de la capitale et de ses habitants pendant la Grande Guerre (1). Un témoignage, commandé par la Bibliothèque de Paris pour rendre compte de l’événement en cours.
Bien loin de l'héroïsme des tranchées, la guerre se devine à peine sur les visages souvent souriants des habitants, saisis dans leur vie quotidienne en noir et blanc : le cinéma, les mères qui promènent les petits dans les jardins. «Au Luxembourg, la vie reprend, les mamans ayant moins d'inquiétude [le siège de Paris a été évité par la bataille de la Marne, ndlr] accordent aux petits leurs distractions favorites», dit la légende sous le cliché centenaire des petits ânes du Luco, mamans à chapeaux et enfants enchantés. La guerre