Presque un rituel. Il y a toujours un moment où Paolo Roversi a froid. Comme si son corps se réveillait soudain, et qu'il lui fallait l'accorder au tempo de la conversation. Il part en quête d'une couverture. Revient avec un gilet. Nous sommes dans son studio, rue Paul-Fort, à Paris, près de la porte d'Orléans. Une partie de sa vie est là. Murs blancs et gris, des coupures de journaux, des livres, des projecteurs. Un décor sobre pour les centaines de milliers de photographies qu'il a prises depuis les années 80, la plupart pour des magazines de mode. Lorsqu'il a débuté, il ne connaissait rien, «même pas la différence entre Dior et Balenciaga, j'étais un analphabète total», dit-il en riant. Il n'a plus sa moustache Clark Gable, noyée dans une barbe sauvage, mais sa voix rauque et charmeuse n'a pas changé. Il aime à citer les artistes, c'est son péché mignon. Aujourd'hui, le cinéaste Robert Bresson : «Il faut être agile et pas habile.» Traduction en version italienne : «Toute opération créative exige de la souplesse. La photographie de mode ne doit pas être codifiée. Il faut laisser son rôle au hasard.»
Le hasard l'a gâté. Une enfance si heureuse que les souvenirs affluent. Il est né le 25 septembre 1947, à Ravenne (Italie), dernier d'une fratrie de cinq enfants. Père médecin généraliste, mère poule : «J'ai souffert un peu de l'absence de mon père, qui travaillait énormément. Ma mère, d'un optimisme à toute épreuve, me réveillait tous les matins e