Et la politique, dans tout ça ? Parce que c'est bien beau, ces histoires de présence, de temps, de consommation, mais on voit bien dans Protographies que, d'une part, la photo anonyme et l'effacement des visages évoquent nécessairement les pratiques dictatoriales et que, d'autre part, l'intérêt pour les taudis (série de dessins Inquilinatos, 1976), l'utilisation de journaux (Paístiempo, 2007) ou de photographies issues de manuels d'histoire colombiens (série Impresiones debiles, 2011), tendent vers un discours critique à l'égard des usages politiques de l'image. Cette évidence a frappé les critiques, mais Muñoz pointe rarement la question.
Dans l'entretien qu'il donne pour le catalogue de l'exposition (et qu'on retrouve sur son site web), il rappelle cependant ses débuts à l'Atelier graphique expérimental de Cali, à l'aube des années 70. C'est à l'occasion d'un projet collectif sur la «lutte populaire en Colombie» qu'il a dessiné la série des Taudis, sous inspiration néoréaliste italienne. Plus loin, il évoque «notre monde capitaliste à la consommation forcenée» et y oppose la notion de «réparation» : dans le monde capitaliste, on ne répare plus (on jette), mais ses œuvres, elles, nécessitent de «petites "réparations" […] sur les sytèmes d'élaboration et d'impression conventionnels». En quoi l'art comme bricolage est néce