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Libération
TRIBUNE

Les images de l’image

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Alors que les photographies très violentes de Gaza ont surgi en abondance sur les réseaux, et que la presse écrite ou digitale publie majoritairement des vues de survivants et de ruines, Jean-Luc Nancy revient sur le nouveau rôle des images.
Un Palestinien blessé par des bombardements israéliens selon des témoins, dans un hôpital de Gaza, le 9 juillet. (Photo Ahmed Zakot. Reuters)
publié le 18 août 2014 à 18h56

A propos de l’expansion prodigieuse des images à travers ce qu’on appelle les «réseaux sociaux», des effets de cette prolifération, surtout lorsqu’elle est liée à ce qu’on appelle encore les «guerres» qui ravagent notre monde et qu’elle induit des bouleversements dans ce qu’on appelle encore «la presse». Je souligne trois singularités de langage car elles témoignent d’un décalage remarquable (dont il y aurait bien d’autres exemples) entre le lexique disponible et les réalités à nommer. Ce décalage n’est pas étranger au sujet à traiter.

- «Réseaux sociaux» suppose que «social» n’a aucun autre sens déterminé que celui de «groupe de communication». Car si on le voulait distinct de «politique», «religieux» ou «communautaire», on serait bien sûr très loin du compte : toutes ces catégories, avec d’autres, sont à l’œuvre dans l’activité de ces réseaux.

- La «guerre», pour sa part, est un terme dont l’acception classique, liée aux Etats souverains et au droit public, n’est pas recevable pour les opérations de polices ou de milices (différence souvent confuse, comme celle entre civils et militaires) dont il s’agit aujourd’hui.

- La «presse», enfin, non seulement n’est plus exclusivement imprimée comme le voudrait son nom, mais est débordée par des flux d’information et de réflexion qui coulent de toutes parts, plus pressés qu’elle et plus qu’elle indéfiniment multipliés, disséminés et diffractés.

Tendanciellement, ces trois registres ne sont que des modes, en incessante transformation, d