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Roman Vishniac, signes de vie

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En 2001, l’historienne Maya Benton découvre les archives du photographe célèbre pour ses images du monde juif avant la Shoah. Pour la première fois, une exposition au musée d’Art et d’Histoire du judaïsme à Paris révèle l’ampleur de son œuvre.
Marion, Renate et Karen Gumprecht, à Central Park à l'automne 1941, peu après leur fuite de Hambourg. (Photo Roman Vishniac. Courtesy Mara Vishniac-Kohn/ICP)
publié le 19 septembre 2014 à 17h06

Le 17 décembre 1951, l'hebdomadaire américain Life affiche en une Vivien Leigh levant des yeux tendres sur Laurence Olivier et consacre six de ses précieuses pages au Dr Roman Vishniac, d'origine russe. Les 5,2 millions de lecteurs du magazine découvrent un homme au visage rond, nœud papillon et bras de chemise, cerné par une forêt de cornues et bocaux - dont l'un est habité par des grenouilles vertes - et très occupé à manipuler un cafard avec des pincettes au-dessus d'une boîte de Petri. Ils apprennent que «sa brillante carrière de pionnier de la microphotographie va atteindre un sommet ce mois-ci, lorsqu'il révélera aux 8 000 chercheurs assistant au congrès annuel de l'AAAS [la plus grande association scientifique au monde, ndlr], à Philadelphie, les détails de sa plus importante découverte : la colorisation». Suit un bref aperçu de sa vie : il a fui «les mitraillettes des Rouges», les nazis et Vichy. Et un vaste portfolio de ses clichés : puce d'eau et ses entrailles, mandibule de coccinelle, tube digestif dans un ver, toutes intimités révélées par l'utilisation révolutionnaire de la lumière polarisée couplée à des agrandissements au microscope et à un appareil photographique. L'article est titré : «Une autre façon de voir les êtres vivants.» Le savant deviendra effectivement une célébrité des sciences de la vie, perfectionnant ses optiques, réalisant des milliers d'images pour des chercheurs, des manuels de biologie, des pu