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Libération
Reportage

Brésil, la quête de la mort des Indiens de Dourados

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publié le 29 mars 1995 à 1h44

Brésil, la quête de la mort des Indiens de Dourados

Le suicide, «acte de foi» devenu signe de désespoir Dourados, envoyé spécial La veille au soir, pour la seconde fois en moins de six mois, Odilia Fernandes, une corpulente Indienne caiua de 17 ans, a tenté de se pendre à l'aide d'une vieille chemise accrochée à une branche d'arbre. Elle suffoquait quand un voisin, alerté par les râles, a mis fin à son supplice. Aujourd'hui, les yeux fuyants, elle ponctue ses phrases lapidaires d'un sourire forcé: «J'ai été poussée à bout par mon mari, qui m'a demandé de ramasser mes affaires et de quitter la maison. La première fois, c'était à cause d'une brouille avec mes beaux-parents.» Ses deux meilleures amies, également adolescentes, ont elles aussi essayé sans succès de se tuer.

Dans la réserve indigène de Dourados, dans l'Etat brésilien du Mato Grosso do Sul, le suicide fait partie du quotidien. Depuis 1980 et jusqu'en février dernier, 146 Indiens s'y sont donné la mort. Une épidémie dont l'ampleur ne peut s'expliquer par les seuls fléaux ordinaires (destruction de l'environnement, réduction de l'espace vital, destructuration tribale) qui frappent l'ensemble des Amérindiens.

Certes, le décor local évoque d'emblée les ravages du télescopage culturel. 8.860 Indiens misérables s'entassent dans une réserve de 3.500 hectares à moins de 5 km d'une ville de 120.000 âmes que le boom du soja a propulsée en quinze ans au nombre des plus prospères du pays. Mais bien des réserves brésiliennes conna