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Libération
Reportage

Sarajevo, une capitale désertée par ses élites. Depuis le début de la guerre, des milliers d'ingénieurs, de médecins ou de professeurs se sont exilés.

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publié le 10 mai 1995 à 5h11

Sarajevo, une capitale désertée par ses élites

Depuis le début de la guerre, des milliers d'ingénieurs, de médecins ou de professeurs se sont exilés.

Sarajevo, envoyé spécial La tour Energo-Invest, repérable à ses façades de miroirs brisés, domine l'ancien quartier des affaires de Sarajevo. Avant-guerre, le bureau du directeur général occupait le 18e étage. De là, il contemplait les hectares d'ateliers et d'entrepôts qui s'étalaient le long de Sniper Alley jusqu'aux faubourgs lointains de Stup et Lukavica. Aujourd'hui, il travaille au troisième étage. L'immeuble, qui fourmillait jadis de blouses blanches, est désert. Energo-Invest ­ 112 usines, dont 40 à l'étranger ­, étendait ses tentacules industrielles socialistes dans les secteurs de la pétrochimie, de l'électricité, la mécanique. Elle tirait sa puissance d'une entreprise d'ingénierie extrêmement compétitive dans les pays non alignés. 7.500 cadres supérieurs travaillaient dans sa tour: ingénieurs, architectes, informaticiens, experts, auxquels s'ajoutaient des professeurs et laborantins de sept instituts de formation gérés par la firme. Cette population tertiaire conférait à Sarajevo, privilégié par le régime yougoslave de Tito, béni par son environnement montagneux, une atmosphère unique dans les Balkans.

Aujourd'hui, les étendues industrielles ont été ravagées par les bombardements, les contacts avec le monde des affaires quasiment rompus. L'ingénierie d'Energo-Invest vivote de quelques chantiers en finition à l'étranger.