Srinagar, envoyé spécial
«Azadi, azadi!» (liberté!) Les haut-parleurs de la mosquée crachent une litanie de slogans. A l’appel du cheikh, des centaines de musulmans se pressent vers le parterre central, levant un poing rageur. Le discours politique fait place sans transition à l’incantation religieuse. «Allah Akbar!» En ce jour de l’Aïd (fête qui commémore le sacrifice d’Abraham), la grande mosquée d’Hazratbal, bloc de marbre blanc posé au bord du lac Dal, aux pieds des sommets enneigés du Cachemire, semble pétrifiée. Un silence de mort entoure le millier de corps agenouillés. La prière achevée, les slogans indépendantistes reprennent de plus belle, tandis que la foule se disperse. Un des principaux leaders locaux, Yaseen Malik, est porté en triomphe par une cohorte de militants surexcités. Vengeur, l’un d’eux assure: «Nous allons porter secours à nos frères qui tombent sous les balles de l’armée indienne.»
Depuis jeudi, la petite ville de Chrar-e Charief, à une cinquantaine de kilomètres de Srinagar, a été le théâtre d’affrontements sanglants entre une trentaine de militants de l’indépendance du Cachemire, armés et retranchés depuis deux mois dans la mosquée Nooruddin, un des lieux saints de l’islam cachemiri, et l’armée indienne. Une partie de la ville a été détruite. 700 bâtiments en bois ont flambé, pris sous le feu croisé entre les deux camps. Le gouvernement du Premier ministre P.V. Narasimha Rao dont l’opposition réclamait hier la démission pour n’avoir pas empêché la