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Libération
Reportage

Genève, le crépuscule protestantL'heure est à la catholicisation des élites dans la cité de Calvin.

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publié le 20 juillet 1995 à 6h53

Genève, de notre correspondant,

Genève, «la Rome protestante», ne se reconnaît plus. Un catholique, français de surcroît, à la tête d'une banque privée! Il y a vingt ans, la nomination de Jean Pastré comme «associé» dans le vénérable établissement Lombard et Odier aurait représenté un terrible séisme sur l'échelle des valeurs calvinistes. Un outrage à la tradition et à un certain esprit genevois, pour qui «ces pasteurs de la finance» à la discrétion légendaire et à l'austérité rigoureuse devaient appartenir aux vieilles familles protestantes, originaires de la rue des Granges, au coeur de la vieille ville. «Le code de morale et de discipline stricte dans laquelle nous avons été élevés nous a enseigné que chaque centime a été gagné à la sueur du front de nos ancêtres. Nous avons le respect du patrimoine, car il représente la rémunération du travail transmise de génération en génération», explique un banquier, pour qui l'identité genevoise est indissolublement liée au calvinisme. Antoine Maurice, rédacteur en chef du Journal de Genève, observe: «Sans Calvin, Genève n'aurait été qu'un autre Bourg-en-Bresse. Son rationalisme austère fut un ferment révolutionnaire dans l'Europe catholique du XVe siècle et fit pendant des siècles rayonner la ville dans le domaine des idées, de la finance et des sciences.»

Mais, aujourd'hui, la plupart des institutions phares de la ville ne sont plus exclusivement en mains protestantes. Le Comité international de la Croix-Rouge, qui fut longtemps un