Ce matin du 10 juillet 1991, la comtesse Alberica Filo Della Torre a bien du mal à traîner au lit. Son mari, parti au bureau plus tôt que d'habitude, la réveille avec un baiser. Puis l'une des femmes de chambre monte lui dire que le grille-pain a rendu l'âme. Alberica descend. Dans cette grande maison de nouveaux riches, près du terrain de golf de l'Olgiata, au nord-ouest de la capitale, c'est déjà le brouhaha. Les deux enfants de la comtesse et un jeune hôte anglais prennent leur petit déjeuner. La dizaine de personnes au service de la maison (jeune fille au pair, valet de chambre, cuisinière, jardinier...) est en pleine activité. Un plateau sur les bras, la comtesse regagne sa chambre. Il est 8h30.
La femme de chambre la découvre deux heures plus tard, allongée par terre, entre le lit et le vestiaire, le visage tuméfié, le crâne enfoncé du côté de la tempe droite. Au cou, des signes d'étranglement «atypiques», selon le rapport d'autopsie, comme si on avait juste serré le larynx. Des traces de matière cérébrale sont visibles ici et là, une grande tache rougeâtre s'est répandue sur la moquette claire. Des cheveux collés de sang sont relevés sur la semelle en bois d'une sandale plate, aussitôt qualifiée d'arme du crime. Les mains et les ongles de la victime, d'habitude véritable réservoir à indices en cas d'étranglement, restent cette fois muets. La jolie comtesse brune de 45 ans n'aurait même pas esquissé un geste de défense face à son bourreau, qui l'a manifestement agressé