Philadelphie, envoyé spécial
«Comprenez, ce n'est pas facile. Tout ça remonte à quatorze ans», s'excuse le témoin, Dessie Hightower, avant de fouiller, une nouvelle fois, dans ses souvenirs. Le juge Albert Sabo se balance sur son fauteuil et avale un bâillement furtif. Face à lui, un homme de 41 ans, Mumia Abou-Jamal, une barbe et de longues tresses, assiste silencieux à la scène: le 3 juillet 1982, ce même juge avait prononcé sa condamnation à mort. Il avait alors 28 ans. Son exécution par injection devait avoir lieu aujourd'hui, mais Mumia Abou-Jamal se bat encore pour obtenir la révision de son procès de 1982.
Aujourd'hui retraité, avec à son actif 32 condamnations à mort, le juge Albert Sabo a 74 ans. Mais, comme le permet le code pénal de Pennsylvanie, il a repris, depuis le début du mois, le chemin de son ancien tribunal pour examiner la demande de révision déposée par les avocats d'Abou-Jamal. Des auditions clairement partiales: ce juge ultraconservateur, ancien membre d'une association locale de défense des policiers qui milite activement pour l'exécution d'Abou-Jamal, un ancien militant du mouvement des Panthères noires, ne dissimule guère de quel côté il penche. Illustration des tensions dans le tribunal: l'éviction, il y a deux semaines, d'une avocate pour «outrage à la cour» et la condamnation, vendredi, pour le même motif, du principal avocat de la défense, Leonard Weinglass, à 1.000 dollars d'amende. Les auditions de Philadelphie se sont achevées mardi, et repren